EL DIARIO : Monsieur le Président, quelle est l’analyse du PCP sur le processus de l’Etat Péruvien et vers quoi se dirige-t-il ?

 

PRESIDENT GONZALO : Nous analysons le processus de la société péruvienne contemporaine comme un processus qui a commencé en 1895. Nous considérons qu’à partir de cette date s’engage le processus dans lequel nous vivons actuellement. Et nous pensons qu’il est composé de trois moments. Un premier moment qui assoit les bases pour le développement du capitalisme bureaucratique. Un deuxième, après la Seconde Guerre Mondiale qui marque la fin du premier, où s’approfondit le capitalisme bureaucratique ; cet approfondissement du capitalisme bureaucratique va faire mûrir les conditions pour la révolution et, avec le commencement de la guerre populaire dans les années 80, nous entrons dans le troisième moment : moment de crise générale du capitalisme bureaucratique. La destruction de la société péruvienne contemporaine a commencé, parce qu’elle est historiquement caduque. C’est pourquoi nous assistons à sa fin et ce qu’il faut, c’est travailler, combattre et lutter pour l’enterrer.

 

EL DIARIO : Pourquoi considérez-vous la thèse du capitalisme bureaucratique comme fondamentale ?

 

PRESIDENT GONZALO : Nous considérons comme essentielle cette thèse du Président Mao Tsétoung parce que, sans la comprendre et sans la maîtriser, il n’est pas possible de développer une révolution démocratique et encore moins de concevoir sa continuation ininterrompue en tant que révolution socialiste. C’est réellement un obstacle, que cette thèse du Président Mao soit éludée et que l’analyse soit embrouillée, quand on nous parle de développement de capitalisme dans les pays arriérés ou de capitalisme dépendant. Ces analyses ne conduisent à rien, si ce n’est à changer la nature de la révolution. Nous pensons que c’est en partant du Président Mao Tsétoung que nous comprendrons bien la société péruvienne et les sociétés dites arriérées.

 

Nous considérons que le capitalisme bureaucratique commence à se présenter au Pérou à partir de 1895, à travers les trois moments que je viens de retracer. Nous les concevons ainsi : sur une base semi-féodale et sous domination impérialiste se développe un capitalisme, un capitalisme tardif, un capitalisme qui naît, lié à la féodalité et soumis à la domination impérialiste. Ce sont ces conditions qui génèrent ce que le Président Mao Tsétoung a appelé capitalisme bureaucratique. Alors, le capitalisme bureaucratique se développe, lié aux grands capitaux monopolistes qui contrôlent l’économie du pays, des capitaux formés, comme le Président Mao le dit, par les grands capitaux des gros propriétaires fonciers, de la bourgeoisie compradore et des grands banquiers. Ainsi va naissant le capitalisme bureaucratique et, j’insiste encore une fois, lié à la féodalité, soumis à l’impérialisme et monopoliste. Il faut prendre cela en compte : il est monopoliste. Ce capitalisme, arrivé à un certain moment de son évolution, s’associe avec le Pouvoir de l’Etat et utilise les moyens économiques de l’Etat ; il les utilise comme levier économique. Ce processus va engendrer l’autre faction de la grande bourgeoisie : la bourgeoisie bureaucratique. C’est de cette façon que va se développer le capitalisme bureaucratique, déjà un capitalisme monopoliste, qui devient alors un capitalisme d’Etat. Mais ce processus l’entraîne à créer les conditions qui font mûrir la révolution. Ceci est, dans le cadre politique, un autre concept important que le président a établi sur le capitalisme bureaucratique.

 

Si nous comprenons le capitalisme bureaucratique, nous pouvons très bien comprendre, comment au Pérou, existent une situation de semi-féodalité, un capitalisme bureaucratique et une domination impérialiste, principalement yankee. Voilà ce que nous devons comprendre, ce qui permet d’entendre et de diriger la révolution démocratique.

 

Maintenant, quel autre facteur important le capitalisme bureaucratique présente-t-il ? Le Président nous signale que la révolution démocratique accomplit certaines tâches socialistes ; par exemple, dit-il, l’aide mutuelle qui a lieu à la campagne dans les bases d’appui s’exprimait déjà. Ainsi donc, pour passer de la révolution démocratique à la socialiste, la confiscation du capitalisme bureaucratique dans son ensemble est une question clé du point de vue économique ; elle permettra au Nouvel Etat de contrôler l’économie, de la diriger, et servira à développer la révolution socialiste. Nous considérons que ce concept stratégique est de grande importance et j’insiste sur le fait que, malheureusement, ce concept est éludé. En tant qu’il en sera ainsi, on ne pourra pas bien comprendre ce qu’est une révolution démocratique dans les circonstances actuelles, celles dans lesquelles nous nous débattons.

 

Il est erroné de penser que le capitalisme bureaucratique se réduit à celui que développe l’Etat avec les moyens économiques de production qu’il détient. Ceci est faux, et est incompatible avec la thèse du Président Mao Tsétoung. Il suffit, pour le comprendre, de penser à la chose suivante : si le capitalisme bureaucratique n’était que le capitalisme d’Etat, il suffirait de confisquer ce capitalisme d’Etat et alors, l’autre capitalisme monopoliste, non étatique, dans quelles mains resterait-il ? Dans celles de la réaction, de la grande bourgeoisie. Cette interprétation, qui consiste à identifier le capitalisme bureaucratique au capitalisme monopoliste d’Etat, est une conception révisionniste et dans notre Parti, elle fut soutenue par le liquidationnisme de gauche : c’est pour cela que nous jugeons cette question comme très importante.

 

D’ailleurs politiquement, cela nous permet de distinguer très clairement la grande bourgeoisie de la bourgeoisie nationale ou moyenne. Et ceci nous donne les moyens de comprendre, afin de n’être à la traîne d’aucune faction quelconque de la grande bourgeoisie, ni de la compradore, ni de la bureaucratique, ce qu’on fait au Pérou, le révisionnisme et l’opportunisme et ce qu’ils continuent de faire. Depuis des décennies, cette politique sinistre amène à considérer une faction quelconque de la grande bourgeoisie comme la bourgeoisie nationale, progressiste et à l’appuyer. La compréhension du capitalisme bureaucratique nous a permis de bien saisir la différence, et j’insiste, entre bourgeoisie nationale et grande bourgeoisie et de comprendre la tactique correcte à suivre, reprenant précisément celle que Mariatégui a établie. Pour cela, nous considérons que la thèse du capitalisme bureaucratique est d’une importance extrême.

 

EL DIARIO : Quelle est, en synthèse, votre analyse politique et économique de la conjoncture actuelle et de la perspective ? Cette situation est-elle favorable au PCP ? Et comment l’est-elle pour la réaction, le révisionnisme et l’opportunisme ?

 

PRÉSIDENT GONZALO : Nous concevons que le capitalisme bureaucratique est entré en crise générale ; plus encore, nous pensons que ce capitalisme bureaucratique est né malade parce qu’il est issu de la semi-féodalité, ou lié à elle, et qu’il est issu de l’impérialisme. La semiféodalité est évidemment caduque et l’impérialisme agonise. De deux parents condamnés à mort pour maladie incurable, quelle sorte d’enfant peut-il naître ? Une créature malade qui est entrée dans sa phase de destruction. Nous pensons que les crises s’approfondissent chaque jour davantage et que, même, comme le soulignent certains économistes, il s’agit d’environ trente ans de crise de laquelle on ne peut pas sortir, même si de temps en temps il y a de petites vagues de récupération ou, comme le dit l’APRA dans ses propres documents internes, que c’est une crise qui a surgi au milieu des années 70.

 

Nous estimons que chaque nouvelle crise est pire que la précédente ; et si nous ajoutons à cela les deux décennies critiques, celles des années 80 et 90, la situation est déjà claire. Que disent-ils ? Que ce gouvernement laissera une situation extrêmement grave, et que le suivant, en supposant qu’il y en ait un, lors du changement électoral, devra chercher à réparer les problèmes en suspense et que ce n’est, en conséquence, qu’à partir de 1995 qu’on pourra penser à un développement ; et ceci dans un pays où nous avons 20 ans de retard. C’est pour cela que nous croyons que sa perspective est extrêmement noire. Cela est-il favorable à la révolution, à la guerre populaire, au Parti ? Oui, certainement, c’est favorable, tout d’abord et principalement, à la classe et au peuple car tous nos efforts leur sont destinés, afin que la classe commande, dirige, que le peuple exerce sa liberté et puisse enfin satisfaire sa faim séculaire. Nous ne voyons aucune perspective pour la réaction et le révisionnisme, nous le croyons unis. Ce sont des siamois et ensemble ils se dirigent vers leur propre tombe. Voilà ce que nous pensons.

 

EL DIARIO : Pourquoi qualifiez-vous le gouvernement apriste, de fasciste et corporatiste ? Sur quoi vous basez-vous pour l’affirmer ? Quelle est votre opinion sur le discours d’Alan García Perez au Congrès de la Jeunesse apriste d’Ayacucho et sur celui qu’il a donné à Païta ? Quelle est-elle aussi sur les mesures économiques du nouveau cabinet ?

 

PRESIDENT GONZALO : En ce qui concerne la caractérisation du gouvernement apriste, sans entrer dans son histoire quia d’autres implications et que nous n’avons pas besoin d’aborder aujourd’hui, la situation concrète qui existait au sein de l’APRA, lorsqu’on lui remit la direction de l’Etat péruvien, était une situation de dilemmes, deux tendances existaient, l’une, aux critères fascistes et l’autre, aux critères démocratico-libéraux. Ainsi était, d’après nous, la situation au sein de l’APRA. Nous entendons ici, par critères démocratico-libéraux, le maintien de cet ordre constitutionnel, réactionnaire, établi en 1920, en 1933 et en 1979; voilà ce que nous entendons par cet ordre démocratico-libéral.

 

L’APRA avait un problème : la nécessité d’investissements pour faire progresser l’économie ou plus concrètement pour nous présenter une vitrine de succès ; c’est bien cela qu’elle a fait : consommer le peu qu’ils avaient pour nous montrer cette vitrine de succès aussi fragile que du verre et ce que nous voyons aujourd’hui en est la preuve. C’est pourquoi en aucune manière on ne pourrait dire que le plan de l’Apra était un bon plan économique, car alors, comment un aussi bon plan économique donne-t-il des résultats aussi catastrophiques ? Cela n’a aucun sens. Ainsi l’Apra a dû faire appel aux capitaux de la bourgeoisie compradore, qui a bien évidemment exigé des conditions et dans les propres documents de l’Apra, il est mentionné que, dès la fin de l’année 85, la grande bourgeoisie, et plus particulièrement la bourgeoisie compradore, commençait déjà à se récupérer et à capitaliser. L’année 86 fut le paradis pour eux ; ils firent alors des milliards de profit, en dollars, comme ils le reconnurent eux-mêmes, pensant qu’ils allaient investir par la suite. Mais ce plan n’allait pas fonctionner, il allait entrer nécessairement en crise, échouer et ils ne pourraient donc pas investir. Ceci aiguisa davantage les disputes, les tensions entre eux, ce qui amena les luttes entre les deux factions de la grande bourgeoisie.

 

L’Apra, d’un autre côté, du côté du peuple, se trouva face aux immenses besoins, insatisfaits, des masses et, comme toujours, elle s’engagea démagogiquement, vis-à-vis de tous. Démagogiquement, parce que ce que cherchait l’Apra, c’était simplement essayer de développer, d’appliquer le processus économique réactionnaire ; et cela ne se fait qu’en restreignant les revenus du peuple, puisque d’où viennent les profits ? De la plus-value ! Donc, elle avait un problème avec les masses et elle le savait bien. Ce qui explique sa politique répressive, anti-populaire, anti-syndicale, anti-ouvrière. On peut voir ceci dès le début. Mais il y avait d’autres circonstances, la guerre populaire ; l’Apra, malgré elle, devait l’affronter et la guerre populaire était déjà, alors, un problème principal.

 

Ce sont toutes ces conditions qui vont déterminer les changements qui se produisent à l’intérieur de l’Apra, et faire que le dilemme se définisse. Mais quand ce dilemme se définira-t-il ? Il se définira avec le génocide de 1986. Là, la lutte de classes des masses, la guerre populaire principalement et l’action génocide ont conduit l’Apra à se déterminer pour le fascisme et le triomphe de la faction fasciste. Nous considérons que c’est à ce moment-là que cela s’est produit et que commença, comme tous le reconnaissent déjà, le discrédit et l’effondrement de l’Apra, non seulement au Pérou mais dans le monde entier.

 

Pourquoi le qualifions-nous de fasciste ? La faction fasciste qui existait déjà dans l’Apra, va prendre des mesures politiques pour mettre sur pied le corporatisme. Nous pouvons déjà le voir dans le premier discours prononcé par Garcia Pérez en juillet 1985. Qu’entendons-nous par fasciste et corporatiste ? Pour nous, le fascisme ; c’est la négation des principes démocratico-libéraux ; c’est la négation des principes démocratico-bourgeois qui sont nés et se sont développés au 18ème siècle en France. Ces principes ont été progressivement abandonnés par la réaction, par la bourgeoisie dans le monde, et la Première Guerre Mondiale nous a déjà montré la crise de l’ordre démocratico-bourgeois. C’est pour cela que le fascisme éclate ensuite. Alors, on constate dans l’Apra la négation des principes de l’ordre démocratico-bourgeois et quotidiennement, la négation de toutes le libertés et de tous les droits constitutionnels établis. Sur le plan idéologique, nous considérons aussi le fascisme comme un système éclectique ; il n’a pas de philosophie définie : C’est une position philosophique constituée de morceaux. Elle prend ici et là ce qui lui convient le mieux. Chez Garcia Pérez ça se reflète clairement : quand il va en Inde, il salue Ghandi et devient ghandiste ; quand il va au Mexique, il salue Zapata et est zapatiste. Lorsque il ira en Union Soviétique, s’il y va, il deviendra le sauveur de la Pérestroïka. Il est comme ça. C’est là un exemple de la formation idéologique, philosophique du fascisme. Il n’a pas de position définie, il est éclectique, il prend ce qu’il a à portée de la main.

En ce qui concerne son corporatisme, nous entendons par là, le fait de bâtir l’Etat sur la base de corporations, ce qui implique la négation du parlementarisme. C’est une question essentielle que Mariátegui soulevait déjà dans son " histoire de la Crise Mondiale ". Il nous disait que la crise de la démocratie bourgeoise s’exprime clairement dans la crise du parlementarisme : si nous voyons le Parlement ici, même s’il est vrai qu’au cours des dernières décennies, c’est l’Exécutif qui a promulgué les lois les plus importantes du pays, c’est sous ce gouvernement apriste que l’Exécutif a le plus accaparé toutes les lois fondamentales, promulgués en sa faveur. Il n’existe aucune loi importante qui ait été promulguée par le Parlement. Voilà la réalité des choses. Tout a consisté à donner des pouvoirs à l’Exécutifs pour qu’il fasse et défasse. Tout n’est que négation du parlementarisme.

 

Le problème du corporatisme, dans le pays, n’est pas récent ; déjà en 1933, quand la Constitution était en discussion au cours de la deuxième restructuration de l’Etat Péruvien de ce siècle, Victor Andrés Belaunde avait déjà proposé le corporatisme de la société péruvienne. Villarán, qui fut chargé du rapport de la Constitution, s’y opposa en demandant : comment allons-nous appliquer le corporatisme s’il n’y a pas de corporations ? Ce fut une façon de s’en tirer à bon compte ; il existe donc déjà quelques antécédents. Aujourd’hui, où l’on parle tant de Belaunde, que ses œuvres viennent d’être publiées, il faut se rappeler sa position : face au libéralisme qui se centre sur l’argent et contre le communisme, négation de la personne humaine, ce qu’il faut, ce sont les systèmes corporatistes, à l’exemple des modèles médiévaux ; il est bon d’en tenir compte pour voir sa filiation et ses racines, et en même temps avoir en tête que c’est intimement lié aux propositions de la Papauté dès le siècle dernier.

 

Vélasco essaya aussi de corporatiser le pays ; pour cela, il commença la formation de corporations de producteurs agricoles par exemple ; sa propre loi agraire, la 17716, du point de vue politique, cherchait à établir des bases corporatives ; la loi sur l’industrie également. Comment ? Au moyen de la communauté industrielle ; sa fameuse organisation politique qui n’est pas arrivée à se constituer, avait aussi des critères franchement fascistes et proposait le corporatisme ; mais ceci n’a pas pu se concrétiser au Pérou. Et que recherchent-ils, que veulent-ils ? La conformation de corporations, c’est-à-dire organiser de façon corporatiste les producteurs et tous les éléments qui composent la société : les ouvriers, les producteurs agricoles, les commerçants, les professions libérales, les étudiants, l’Eglise, les Forces Armées, les Forces de la Police. Tous vont nommer leurs délégués et former ainsi un système corporatiste. C’est ce qu’ils cherchent et ce que l’Apra est en train de faire ; et les régions, micro-régions, qu’est-ce que ça veut dire ? Que tout ce plan de régionalisation aujourd’hui sert à corporatiser le pays. C’est pour cela que nous devons nous y opposer ouvertement ; non seulement parce que ce sont des manipulations politiques électoralistes de l’Apra, mais aussi parce qu’il s’agit d’un système corporatiste. Et en plus il est en train de mettre en danger un pays qui n’a même pas d’unité nationale constituée. Ce sont là des questions fort sérieuses, et c’est pour cela que nous maintenons qu’il s’agit d’un gouvernement fasciste et corporatiste. La voie qu’il veut impulser et pour cela sa grande inquiétude pour les régions qu’il veut imposer à n’importe quel prix, voilà ce que nous pouvons voir ; cela explique que toutes ces assemblées parlementaires extraordinaires n’aient pu réaliser ce que Garcia avait promis. L’année dernière, il déclara : ou les régions se constituent ou je ne m’appelle plus Alan Garcia Pérez. L’année est passée et je ne sais pas comment il s’appelle aujourd’hui, car les régions ne sont pas encore formées ; maintenant ils parlent de la fin de l’année, nous verrons bien.

 

Quant au fait d’identifier fascisme avec terreur, avec répression, il nous semble que c’est une erreur ; voilà ce qui se passe dans ce cas : si on se rappelle le marxisme, l’Etat est la violence organisée. C’est cette définition que nous ont donnée le classiques et tout Etat utilise la violence parce qu’il est dictature. Sinon, comment lutterait-il pour opprimer et exploiter ? Il ne pourrait pas le faire. Ce qui se passe en fait, c’est que le fascisme développe une violence plus vaste, plus raffinée, plus sinistre, mais on ne peut pas dire que fascisme est égal à violence, c’est une grossière erreur. Ce sont là des idées qui, après la deuxième guerre mondiale, vont se développer ici, au Pérou et ce sont des idées qui ont été diffusées et proposées à de multiples reprises par Del Prado, ce sont aussi des idées soutenues par Dammert.

 

Identifier le fascisme avec terreur signifie ne pas comprendre Mariátegui qui, dans " Figures et aspects de vie mondiale ", quand il se réfère à H.G. Wells, nous dit que l’Etat bourgeois a un processus de développement et c’est ce processus de développement qui le conduit à un système fasciste et corporatiste. Ceci se comprend très bien si nous lisons les œuvres de Mariátégui, l’œuvre citée " Histoire… " ou " La Scène Contemporaine ". Rappelons-nous qu’il l’a vécu, étudié et connu directement.

 

Dans le pays, il faut voir le fascisme sous ses divers aspects, à partir de son idéologie, de sa politique, de sa forme organique ; voir comment il se sert de la violence, sa terreur. Aujourd’hui nous voyons comment il applique une violence raffinée et plus développée, plus étendue, brutale et barbare ; c’est cela qu’on appelle terreur ; mais d’autre part, la terreur blanche n’a-t-elle pas toujours été appliquée ? Chaque fois que les réactionnaires se sont trouvés en difficulté, ils ont appliqué la terreur blanche. Aussi, en aucun cas nous ne pourrions identifier et réduire tous les fascismes simplement à la terreur. Nous devons comprendre qu’il s’agit d’une violence plus raffinée et que bien sûr il développe le terrorisme mais ce n’est pas tout. C’est un des composants, c’est sa manière de développer la violence réactionnaire.

 

En ce qui concerne le discours de Garcia Pérez, au Congrès de la jeunesse apriste : en synthèse, à l’intérieur de l’Apra, ily a une lutte intense en rapport avec son prochain Congrès, et le problème est de savoir si Garcia Pérez conservera ou non le contrôle de ce Parti afin de rester au Pouvoir, en collusion avec les Forces Armées. Depuis un certain temps, on voit que la Jeunesse apriste remet en question le travail gouvernemental. C’est ce qui s’est produit lors de ce Congrès d’Ayacucho. Garcia Pérez a dû se déplacer en toute hâte pour expliquer, justifier et se présenter comme le sauveur. C’est ce qu’il veut, car il voit à quel point il est important de gagner la jeunesse pour satisfaire ses appétits de führer. C’est, je crois, l’essentiel. Tout ce qu’il a dit sur notre Parti et la supposée admiration qu’il dit avoir pour lui, tout ce ci nous révèle simplement la lutte à l’intérieur de l’Apra, car il ne peut pas avoir d’admiration pour nous, lui un boucher et un assassin quotidien du peuple, des combattants, des communistes. Ce ne sont que des gestes démagogiques, des appétits effrénés en rapport avec le congrès de l’Apra et ses perspectives politiques, parce qu’il joue plusieurs cartes, du fait qu’il est un homme assez jeune.

 

A Païta, le " discours de Païta " est, en synthèse, un discours fasciste, ouvertement fasciste ; ce n’est pas, comme on le dit, un avertissement aux parlementaires qui firent du tapage, ce qui est chose courante parmi eux et n’a rien d’extraordinaire, il n’en fut pas ainsi ; c’est un discours strictement fasciste ; Garcia Pérez veut s’ériger en führer ; ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle " conducteur " ; très souvent, le député Roca lui-même l’appelle ainsi :  " conducteur ", n’est-ce pas similaire à führer ? Cela veut dire la même chose en allemand. Pour cela, je crois que c’est correct de l’appeler, comme certains le font, " apprenti führer " ; mais en fin de compte, il prouve qu’il est un vulgaire démagogue, avec de grands appétits débridés, prêt à tout pour les satisfaire. L’égoïsme démesuré est, je crois, une de ses caractéristiques.

 

Pour ce qui est de mesures économiques du nouveau cabinet, bien entendu, personne n’est d’accord avec elles ; le peuple encore moins, et c’est ce qui nous intéresse. Alors se développe une double contradiction : la première avec la bourgeoisie compradore pour qui les mesures économiques sont insuffisantes. Elle demande au gouvernement de l’Apra davantage de mesures et exige que soit défini son plan, parce qu’il en présente un pour 18 mois mais avec des lignes générales sans concrétiser des questions importantes. (Ainsi, durant ces cinq années, l’Apra passera d’un plan d’urgence à un autre plan d’urgence puis à un nouveau plan d’urgence, d’urgence en urgence, ce qui sous-entend l’absence complète de coordination entre les plans qu’il pensait appliquer dans son gouvernement ; je me réfère à ses propres documents). La deuxième contradiction, avec le peuple, comme il devait évidemment lui serrer la ceinture pour que se fasse une recapitalisation. D’où et comment extraire des capitaux ? En réduisant les salaires. Voilà, en résumé, les mesures qui créent plus de problèmes que ceux existant déjà et, pendant ce temps, l’Apra continue, démagogiquement, de remettre à plus tard ce que l’ordre-même dans lequel elle évolue, lui impose et ce qu’elle-même fait en cachette, parce qu’elle est en collusion, depuis un certain temps déjà, avec les Etats-Unis et avec l’impérialisme. Sa relation avec la Banque Mondiale est très claire, ses liens avec le B.I.D. aussi et ce sont les instruments, les plus utilisés aujourd’hui par les impérialistes, étant donné le discrédit du F.M.I. , bien que la perspective soit qu’elle rentre au bercail. Ainsi donc, ces mesures économiques n’améliorent pas la situation. Elles vont l’aggraver et nous aurons une situation économique extrêmement grave et critique, qui va s’étendre davantage encore, retombant brutalement sur les masses.

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